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Report d’imposition obligatoire : quand l’avocat se trompe sur l’appréciation de la soulte de 10 %

L’avocat qui rédige l’acte d’apport de titres à une société IS en le plaçant sous le bénéfice du régime du report d’imposition de l’article 150-0 B ter du CGI alors que la soulte reçue par l’apporteur excède 10 % de la valeur nominale des titres reçus engage sa responsabilité pour manquement à son devoir d’information et de conseil.

Dans cette affaire, une contribuable a apporté à une société soumise à l’IS les parts sociales qu’elle détenait au sein de plusieurs sociétés.

L’acte d’apport, rédigé par l’avocat selon acte sous seing privé du 31 décembre 2012, mentionnait que l’apport entrait dans le champ d’application du report d’imposition obligatoire de l’article 150-0 B ter du CGI, permettant un différé d’imposition de la plus-value d’apport.

L’apport, évalué à 20 364 000 € a donné lieu à l’attribution de 183 640 actions nouvelles d’une valeur de 100 € chacune ainsi que d’une soulte en numéraire de 2 000 000 € comptabilisée en compte courant d’associé.

Le 12 janvier 2015, l’administration fiscale a redressé. En effet, dans ce cas, le report d’imposition n’était pas applicable, la soulte versée excédant 10 % de la valeur nominale des titres reçus (2 000 000/18 364 000 x 100 = 10,89 %) (CGI art. 150-0 B ter, I.al. 2).

Dès lors, l’imposition d’un montant total au titre de 2012 a été réglée intégralement, soit 1 853 270 €.

La contribuable a assigné l’avocat en responsabilité et indemnisation de son préjudice.

Si la responsabilité au titre d’un manquement à son devoir d’information et de conseil quant aux conditions permettant de bénéficier d’un report d’imposition de la plus-value a bien été retenue, s’en est suivi un contentieux sur le montant de l’indemnisation.

La cour d’appel a considéré que la faute de l’avocat ayant fait perdre une chance de 80 % de pouvoir bénéficier du report d’imposition, le préjudice réparable devait être évalué à 10 % du montant total de l’imposition réglée, capital, intérêts et majorations de retard compris au regard de la chance perdue dès lors que du fait de la faute de son avocat, la contribuable n’avait pas été en mesure d’anticiper l’imposition appliquée, soit 148 261 € (1 853 270 x 10 % x 80 %).

La Cour de cassation casse et annule l’arrêt d’appel en ce qu’il limite la condamnation de l’avocat à payer la somme de 148 261 €. Selon elle, à la différence de l’impôt, il n’y a pas lieu d’affecter un coefficient de 10 % aux pénalités, intérêts et majorations liées au retard que la contribuable n’aurait pas eu à payer en l’absence de faute de l’avocat.

L'affaire est renvoyée.

Pour aller plus loin :

« Titres de sociétés et instruments financiers : quelle fiscalité ? », RF 2021-5, § 4505

Cass. civ., 1re ch., 15 mai 2024, n° 22-24072

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