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GPA faite à l’étranger sans lien biologique avec l’enfant : reconnaissance en France de la filiation

Lorsqu’un enfant né d’une gestation pour autrui (GPA) n’a aucun lien biologique avec le parent d’intention, la filiation établie légalement dans cet autre pays peut être reconnue par la France conformément à la spécificité de la filiation construite par le droit étranger.

Gestation pour autrui (GPA) à l’étranger

Si en France la gestation pour autrui est interdite, des personnes y ont recours en se rendant dans des pays qui l’autorisent.

L’acte de naissance délivré par ces pays établit la filiation à l’égard des parents d’intention, conformément à la loi locale.

À leur retour en France, les parents qui souhaitent que leur enfant bénéficie d’un acte de l’état-civil français peuvent avoir recours à différentes procédures : transcription directe de l’acte d’état-civil étranger sur les registres de l’état-civil français, exéquatur du jugement étranger établissant la filiation ou encore adoption.

L’affaire portée devant la Cour de cassation concernait la procédure d’exéquatur, procédure judiciaire par laquelle la France reconnaît et exécute une décision de justice étrangère après que le juge français ait procédé à un certain nombre de vérifications, dont celle de sa conformité avec l’ordre public international français.

Reconnaissance d’une filiation à l’étranger ne correspondant pas à la réalité biologique

Un enfant, conçu avec les gamètes de deux tiers donneurs, est né le 8 décembre 2019 au Canada. À la suite d’une convention de gestation pour autrui conclue entre Madame S et la mère porteuse, Madame S a été déclarée seul parent de l’enfant par un jugement canadien du 1er février 2021 entraînant sa garde exclusive et l’ensemble des droits et responsabilités parentaux à son égard.

Les juges de première instance et d’appel ont déclaré le jugement canadien exécutoire sur le territoire français et jugé que celui-ci produisait en France les effets d’une adoption plénière, ce qu’a contesté le procureur général près la cour d’appel de Paris estimant que la reconnaissance en France d’une filiation établie à l’étranger qui ne correspondrait pas à la réalité biologique serait contraire à l’ordre public international français.

Or, la Cour de cassation relève que l’ordre public international ne saurait faire obstacle à l’exéquatur d’une décision établissant la filiation d’un enfant né à l’étranger qui n’aurait pas de lien biologique avec l’enfant aux motifs suivants :

-l’absence de reconnaissance porterait une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée de l’enfant ;

-les modes d’établissement de la filiation qui reposent sur la vraisemblance biologique n’écartent pas, pour autant, l’établissement de filiations qui ne sont pas conformes avec la réalité biologique.

Il n’en irait autrement qu’en cas de fraude ou d’absence de consentement des parties à la convention de GPA, ce qui n’était pas le cas en l’espèce (la mère porteuse avait librement et volontairement donné son consentement et accepté que Madame S soit le seul parent légal et lui avait transféré ses droits, de même que les donneurs anonymes n’étaient pas les parents légaux de l’enfant).

Par conséquent, la Cour de cassation en a déduit que les conditions de l’exéquatur étaient réunies autorisant l’enfant à obtenir des documents d’état-civil français.

Effets attachés à la filiation limités à la spécificité de la filiation construite par le droit étranger

Le procureur général fait également grief à l’arrêt de faire produire au jugement canadien les effets d’une adoption plénière sur le territoire français alors que la décision revêtue d’exéquatur n’était pas un jugement d’adoption.

Sur ce point, la Cour de cassation casse et annule l’arrêt. La filiation établie par le droit canadien n’a pas à être assimilée, en France, à une adoption. La filiation doit être reconnue en France conformément à la spécificité de la filiation construite par le droit étranger, soit en tant que filiation d’intention.

Cass. civ., 1re ch., 14 novembre 2024, n° 23-50016

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