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Patrimoine

Donations Successions

Intention libérale et donation

C'est à celui qui invoque l’existence d’une donation d’en rapporter la preuve caractérisée par l'intention libérale.

Sans intention libérale, pas de donation

La donation est un acte gratuit par lequel le donateur dispose d’un bien au profit du donataire qui l’accepte, de manière immédiate et irrévocable (c. civ. art. 893 et 894). La gratuité de l’opération suppose donc l’existence d’un double critère :

-un critère intentionnel : le disposant doit vouloir faire plaisir au bénéficiaire. Cet élément dénommé « l’intention libérale » doit être déterminant ;

-un critère matériel : la libéralité doit concéder un avantage objectif, un profit pour le donataire, sans contrepartie pour le donataire qui s’appauvrit.

Seule une libéralité qui suppose un appauvrissement du disposant dans l’intention de gratifier son héritier est rapportable à la succession (c. civ. art. 843).

Mise à disposition gratuite d’un logement : l’intention libérale doit être prouvée

Lorsque la mise à disposition d’un logement s’opère de façon gratuite au profit d’un héritier, la question se pose de savoir si l’avantage indirect qui résulte de l’absence de paiement des loyers constitue, ou non, une libéralité.

En l’espèce, à la suite du décès de leurs parents en 2008 et 2013, des difficultés se sont élevées lors du règlement de la succession entre les deux enfants. Le fils réclamait à sa sœur le rapport d’une somme équivalente à la valeur locative de l’appartement dépendant de la succession qu’elle avait occupé privativement depuis 1986.

Pour condamner la fille à rapporter à la succession une indemnité d’occupation pour la période de 2009 à 2013, la cour d’appel a relevé que celle-ci n’était pas en mesure de justifier du paiement d’un loyer à son père décédé en 2008. En effet, elle n’était en mesure de produire que quelques quittances concernant uniquement les années 2003 et 2004 ainsi que 2007 et 2008.

Sur pourvoi de l’héritière, la Cour de cassation casse et annule l’arrêt d’appel et renvoie l’affaire. Dans la droite lignée de ses arrêts rendus depuis 2012 (cass. civ., 1re ch., 18 janvier 2012, n°s 10-27325, 11-12863, 10-25685), la Cour de cassation rappelle qu’en se déterminant ainsi, sans constater comme il lui incombait, l’intention libérale du donateur, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision (cass. civ., 1re, 16 décembre 2020, n°19-18472).

Il appartient ainsi à l’héritier qui demande un rapport à la succession de prouver l’existence d’une libéralité. En effet, c’est à celui qui invoque l’existence d’une donation d’en rapporter la preuve.

Quand le caractère rémunératoire chasse l’intention libérale

En principe, les donations de biens présents faites entre époux pendant le mariage sont irrévocables (c. civ. art. 1096, al. 1). Par exception, les donations prenant effet au cours du mariage consenties avant le 1er janvier 2005 demeurent librement révocables pendant le mariage et révocables de plein droit en cas de divorce (c. civ. art. 267 et 1096 dans leur rédaction en vigueur avant la loi 2004-439 du 26 mai 2004).

Dans cette affaire, deux époux mariés sous le régime de la séparation de biens ont divorcé en 2008 et des difficultés se sont élevées à l’occasion de la liquidation de leurs intérêts patrimoniaux. L’ex-épouse avait notamment prélevé, avant 2005, des sommes sur le compte bancaire du couple afin de financer l’acquisition de biens immobiliers personnels. Indiquant qu’il s’agissait d’une donation de biens présents consentie pendant leur mariage, l’ex-époux a fait valoir la révocabilité de plein droit suite au divorce.

Pour contester la révocabilité de cette donation, l’ex-épouse a demandé sa requalification en donation rémunératoire alors irrévocable, même en cas de divorce. En effet, l’indivisaire qui gère un ou plusieurs bens indivis a droit à la rémunération de son activité. En l’espèce, elle avait géré la recherche des locataires des biens indivis du couple.

La cour d’appel rejette sa demande de requalification en donation rémunératoire. Pour décider que les versements litigieux constituaient des libéralités révocables, la cour a retenu que les sommes versées par l’ex-époux dépassaient largement sa contribution aux charges du mariage, que l’ex-épouse ne chiffrait pas son investissement dans la réfection des immeubles qui restait modeste et que les travaux d’amélioration avaient été majoritairement financés par ce dernier.

Sur pourvoi de l’ex-épouse, la Cour de cassation casse et annule l’arrêt d’appel et renvoie l’affaire.

Pour la Cour de cassation, en se déterminant ainsi, sans rechercher comme il lui incombait, si l’ex-époux établissait que le financement par lui des acquisitions n’avait pas d’autre cause que son intention libérale, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision (cass. civ., 1re ch., 16 décembre 2020, n°19-13701). En effet, lorsqu’un époux séparé de biens acquiert un bien, soit à titre personnel, soit indivisément avec son conjoint, au moyen de fonds fournis par ce dernier, sa collaboration non rémunérée à l’activité professionnelle de celui-ci ou à la gestion du ménage et à la direction du foyer peut constituer la cause des versements effectués sur son compte dès lors que, par son importance, cette activité a exédé sa contribution aux charges du mariage et a été source d’économies.

Pour aller plus loin :

Voir « Donations -successions », RF 2020-6, §§ 1703 et 2362

Cass. civ., 1re ch., 16 décembre 2020, n°s 19-18472 et 19-13701

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Date: 22/12/2024

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