Patrimoine
Transmission d'entreprise
Intérêt économique de l'acquisition de l'usufruit temporaire des parts d'une société
Indépendamment de l’économie fiscale que procure à une société le fait d’acquérir l’usufruit temporaire des parts d’une autre société (amortissement de l’usufruit, déduction des frais d’acquisition), l’abus de droit n’est pas constitué lorsque le choix répond à une préoccupation de nature économique.
Dans cette affaire, des exploitants d’un fonds rural qui possédaient une SCEA et une SCI ont cédé l’intégralité de l’usufruit de leurs parts à une SARL constituée en vue de la reprise du fonds rural, pour une durée de 21 ans, et la nue-propriété aux 2 associés uniques de la SARL (à l’exception d’une part de chaque société conservée en toute propriété).
Grâce à ce montage, la SARL a pu procéder à l’amortissement de la valeur totale de l’usufruit temporaire acquis et déduire les frais liés à cette acquisition. L’administration a considéré que le montage conférant à la SARL l’usufruit temporaire des parts de la SCEA et de la SCI avait été réalisé dans un but exclusivement fiscal et a constaté un abus de droit (LPF art. L. 64). Par conséquent, l’administration a remis en cause les amortissements opérés sur l’usufruit temporaire ainsi que la déduction fiscale des intérêts de l’emprunt que la SARL avait souscrit pour acquérir l’usufruit temporaire des parts.
Débouté en première instance, le Ministre de l’action et des comptes publics fait appel.
Selon la Cour administrative d’appel, il n’est pas établi que l’acquisition de l’usufruit temporaire des parts constituerait un montage purement artificiel et fictif dans la mesure où les sociétés en cause sont le support d’activités économiques réelles et que la SARL a bien perçu des revenus au titre de son usufruit temporaire.
Par ailleurs, l’administration soutient que la taxation à l’IS des revenus versés à la SARL est plus avantageuse qu’une taxation à l’IR et que l’opération entraîne une absence de taxation des revenus à l’IR et aux prélèvements sociaux entre les mains des associés de la SCARL. La Cour répond que si la SARL avait acquis les parts en pleine propriété, les revenus afférents à ces parts auraient également été soumis à l’IS.
Enfin, la Cour relève que l’apport de l’usufruit des parts à la SARL a permis à la SCEA de continuer à bénéficier de la mise à disposition des terres agricoles. En effet, l’article L. 411-37 du code rural exige que le capital d’une SCEA soit majoritairement détenu par des personnes physiques pour pouvoir bénéficier de l’apport des terres dont ses associés sont locataires. Tel n'aurait pas été le cas si la SARL avait acquis la pleine propriété des parts de la SCEA.
Par conséquent, la Cour rejette l'appel.
CAA Douai 1er juillet 2019, n°17DA01029
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